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Prendre en compte le genre en éducation affective et sexuelle

La notion de genre est une question qui soulève de nombreux débats et polémiques.
Ce dossier tente de faire un point sur la question en se basant sur des références scientifiques.

La notion de genre est apparue dans les années 1970 aux Etats-Unis sous le terme "gender" par des féministes qui ont mené une réflexion autour du sexe et des rapports hommes / femmes. 
Exporté en France dans les années 1980, il a également été investi par les sciences sociales et humaines.

Distinguer le sexe et le genre

  • Le sexe relève du biologique et de l'inné

    Il se réfère au fait d'être un homme ou une femme en fonction de son sexe biologique.
    Il désigne les caractéristiques biologiques et physiologiques qui différencient les hommes des femmes.

  • Le genre est une construction sociale

    Il se réfère à la masculinité (ou à la virilité) et à la féminité, qui sont des notions fluctuantes et subjectives, liées aux normes et valeurs d'une société donnée à une époque donnée.
    Il désigne les différences entre les hommes et les femmes liées au contexte social et culturel. Il sert à évoquer les rôles qui sont déterminés socialement, les comportements, les activités et les attributs qu'une société considère comme appropriés pour les hommes et les femmes.
    Le genre n'est pas figé : il est en évolution et en mutation constante en fonction de l'environnement socioculturel et des normes d'une société.

  • L'asymétrie des rapports sociaux de genre

    Les études sur les rapports sociaux de genre aboutissent au constat que les relations entre les genres ne sont pas égales : dans de nombreuses sociétés et au cours de l'histoire, notamment en occident, le genre masculin et les attributs qui y sont attachés est valorisé par rapport au genre féminin.

    D'autres termes proches sont employés pour désigner les différences entre les hommes et les femmes socialement construites : le sexe social / les rapports sociaux de sexe / la domination masculine (Pierre Bourdieu) / la valence différentielle des sexes (Françoise Héritier)

  • Stéréotypes de genre, rôles sexuels, sexisme

    D'autres concepts sont liés aux inégalités découlant des rapports sociaux de genre.

    Pour avoir des définitions de ces concepts, consulter l'article Sexisme, stéréotype, rôles sexuels de notre dossier sur l'égalité et le respect dans les relations filles garçons.

  • C'est quoi le genre ?

Socialisation, stéréotypes et inégalités liés au genre

Dès le plus jeune âge, les enfants sont conditionnés, dans leurs différents environnements, par l'assignation à des rôles sociaux spécifiques liés au fait d'être fille ou garçon, homme ou femme. Certaines de ces normes, qui font partie de la socialisation, sont transmises et intégrées de façon inconsciente comme étant naturelles, mais peuvent être source de discrimination et d'inégalité entre les sexes.

  • La socialisation de genre dans la famille : des rôles sexuels attribués dès l'enfance par la famille

    • les parents incarnent chacun un rôle différent : le rôle du père et de la mère est très différencié. La mère est plus en charge des tâches domestiques, de soin, d'activités et d'échanges verbaux, du soutien scolaire. Le père est plus investi dans les jeux physiques, activités ludiques ponctuelles, et une ouverture vers le monde extérieur.
    • les parents perçoivent leurs enfants différemment et adoptent des attitudes différentes en fonction de leur sexe : ils qualifient les filles de "mignonnes" et les garçons de "solides". Ils valorisent certains comportements chez les filles (docilité, aptitudes relationnelles) et d'autres chez les garçons (combativité, compétitivité).
    • il proposent  à leurs enfants des environnements différenciés selon qu'il sont fille ou garçon : vêtements et jouets sexués ; jeux favorisant la réflexion ou l'identification à des héros actifs chez les garçons (legos, Superman..) ; jeux d'imitation et de conformité à des rôles sociaux chez la fille ou identification à des héros passifs (jouer à la poupée, à la marchande, à la dinette, princesses).v
  • La socialisation de genre à l'école : dans le milieu scolaire, les filles et les garçons, bien qu'à réussite égale, sont traités différemment

    • par leur cursus et orientation scolaire : à capacité et réussite égale, les filles sont plus orientées vers des filières sociales ou littéraires, les garçons vers des filières scientifiques ou plus prestigieuses.
    • par le comportement des enseignants : inconsciemment, les enseigants ont des attitudes qui renforcent les inégalités de genre. D'après des études, les enseignants récompensent les performances des garçons, tandis qu'ils valorisent la conformité des filles. Ils attribuent la réussite des filles à leurs efforts et celle des garçons à leur talent. De même, ils ont des attentes stéréotypées en fonction des sexes : les filles sont considérées comme dociles, les garçons turbulents.
    • par la représentation des hommes et des femmes dans les manuels scolaires : des études ont constaté une sous représentation numérique des femmes et de leur rôle, souvent présenté comme subalterne par rapport aux hommes
  • La socialisation de genre à travers les pratiques culturelles, les médias et le sport : d'autres milieux socialisants et éducatifs véhiculant des stéréotypes de genre

    • la littérature jeunesse : différentes études montrent que les personnages masculins sont surreprésentés et les héros principalement masculins. Les garçons sont présentés à l'extérieur, les filles à l'intérieur. Les personnages féminins sont confinés au rôle maternel où à des tâches domestiques, les hommes présentés faisant du sport ou dans leur milieu professionnel.
    • la publicité et les médias : apportent des représentations stéréotypées des femmes et des hommes.
      les pratiques sportives : certains sports continuent d'être considérés comme masculins (le football, le rugby, les sports de combat...), d'autres féminins (la gymnastique, la danse).

Genre et santé sexuelle

Le genre a également un impact sur la santé.
Ainsi, on constate que ce sont majoritairement les femmes qui prennent en charge la santé sexuelle dans un couple ou une relation. De plus, elles peuvent avoir du mal à négocier l'usage du préservatif avec un homme. Enfin, des facteurs biologiques, économiques et sociaux rendent parfois les femmes plus vulnérables face à l'infection du VIH et des IST.

  • Les femmes plus responsables que les hommes de leur santé sexuelle

    La prévention des grossesses non planifiées reste majoritairement une question gérée par les femmes.

    "La socialisation différenciée selon le sexe contribue également à la plus grande sensibilité des femmes à leur santé et aux messages de prévention....De façon générale, se conformer à l'idéal masculin de virilité suppose, pour les hommes, de rejeter les signes de faiblesse, dont la maladie fait partie. Au contraire, le rôle de la femme en tant que gestionnaire de la santé du groupe familial peut contribuer à sa proximité avec le système de santé, de même que le suivi gynécologique. Ainsi, tout au long de leur vie, les femmes sont plus nombreuses à déclarer consulter des médecins généralistes (pour partie en raison des suivis médicaux liés à la contraception, la grossesse et la ménopause) et à recourir à la prévention."
    extrait de La santé des femmes en France, Etudes et résultats (n° 834 - mars 2013)

    Par contre la prévention des IST nécessite le recours à des méthodes préventives (préservatif masculin) à négocier avec les hommes, ce qui peut parfois poser des difficultés, notamment dans le cadre de rapports hors d'une relation de couple stable :
     "Les rapports de pouvoir au sein de la relation construisent ....un rapport spécifique au risque et placent les femmes en situation de plus grande vulnérabilité préventive surtout lorsqu'elles s'écartent d'une sexualité monogame"
    extrait de "De la contraception à la prévention : les enjeux de la négociation aux différentes étapes des trajectoires affectives et sexuelles " / in Enquête sur la sexualité en France : pratiques, genre et santé , Paris : La découverte, 2008

  • Une plus grande vulnérabilité des femmes face aux risques : des vulnérabilités spécifiques face au VIH / sida et aux IST

    "Les femmes présentent des risques accrus d'infection par le VIH au cours d'un rapport sexuel en raison de facteurs biologiques et de leur vulnérabilité socio-économique entraînant des difficultés tant dans l'accès à l'information et à la prévention, que dans la négociation de la prévention avec leurs partenaires."

    "Les femmes sont également plus nombreuses que les hommes à déclarer avoir contracté une infection sexuellement transmissible (IST). L'augmentation des IST témoigne d'un relâchement des comportements sexuels de prévention pour les femmes comme pour les hommes. Les cas de nouveaux diagnostics concernent principalement les femmes âgées de 25 à 29 ans. À tous les âges, les femmes sont plus touchées par l'incidence cumulée des IST . Les femmes qui ont contracté une IST ne ressentent pas forcément de symptômes, ce qui augmente le risque de transmission, notamment du VIH."

  • Les jeunes filles plus exposées que les garçons

    Selon une enquête menée en 2013 par Sida Info service auprès de 9000 appelants de 15 à 19 ans sur la ligne d'écoute, on constate :

    "Chez les jeunes, huit relations sur dix ont lieu avec un-e partenaire occasionnel-le (80,1 %). À l'inverse des garçons, les filles déclarent deux fois plus souvent des prises de risques dans le cadre d'une relation stable ou dans laquelle elles envisagent de s'engager (22,7 % contre 10,9 % des garçons de moins de 20 ans. "

    "Par ailleurs, les filles apparaissent plus souvent exposées aux risques de transmission par pénétration mal ou non protégée (63,4 % des prises de risques sexuels décrites contre 47,5 % chez les garçons). Dans ce sens, elles sont aussi beaucoup plus nombreuses à rapporter des rapports sans préservatif (83 % contre 58,1 % des garçons, parmi les jeunes décrivant des relations hétérosexuelles à risque sexuel). "

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