Papillomavirus : un plan d’action pour améliorer la couverture vaccinale des jeunes à Pantin.
Date de modification : 12/02/2024
Pour pallier ce déficit, le Crips Île-de-France, en partenariat avec l’Agence régionale de santé, a mis en place un projet de recherche et d’action afin d’améliorer la couverture vaccinale HPV chez les jeunes filles et garçons de Pantin.
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Petit rappel : l’infection au papillomavirus, qu’est-ce que c’est ?
L’infection au papillomavirus humain (HPV) est une infection sexuellement transmissible que l’on peut attraper dès les premiers rapports sexuels.
Environ 80 % des jeunes filles et garçons seront exposés à un virus HPV et 60 % des contaminations ont lieu pendant la première année de vie sexuelle (source Institut national du Cancer).
6 300 cancers sont dus aux HPV chaque année en France.
Pour prévenir les risques d’infection et le développement de cancers, des vaccins efficaces existent. En effet, une couverture vaccinale élevée, associée à des dépistages fréquents, permettrait de diminuer fortement le nombre de cancers du col de l’utérus en France et de réduire également les risques associés à d’autres cancers liés aux HPV chez les femmes et les hommes.
Comment atteindre les 80 % de couverture vaccinale en France d’ici 2030 ?
Les chiffres en France
La stratégie nationale de santé sexuelle 2017-2030 ainsi que le Plan Cancer 2021-2030 prévoient comme objectif en France :
La couverture actuelle est très loin des objectifs fixés. En effet, seul 37,4 % des jeunes de 16 ans ont un schéma de vaccination complet (source GEODES). La région Île-de-France compte parmi les régions dont la couverture vaccinale est la plus faible (43 %) et se positionne même en dessous de la moyenne nationale.
Comment expliquer ce retard ?
En 2019, l’institut de sondage IPSOS a mené une étude sur l’état des connaissances et la sensibilisation des publics concernant les papillomavirus en Europe et en France. De manière général, 64 % des Français et des Françaises ont répondu connaître ce qu’est l’infection aux HPV. Pour autant, sur les personnes interrogées, seulement 12 % savaient que le risque d’infection aux HPV concernait les femmes et les hommes. En effet, 40 % déclaraient ne pas savoir ou ne pensaient pas que les papillomavirus humains pouvaient causer des cancers chez les hommes.
La méconnaissance sur les risques d’infection explique sans doute ces chiffres. Malgré de nombreuses campagnes de sensibilisation et de prévention, des tabous subsistent encore. Le fait que l’infection aux papillomavirus soit intimement liée à la sexualité devient un obstacle à la vaccination pour des parents qui ne sont pas prêts à envisager l'entrée dans la vie affective et sexuelle de leurs enfants.
Quelles solutions ?
L’enjeu, avec la mise en place de ce plan d’action, est de mobiliser les acteurs de proximité, notamment les médecins généralistes de Seine-Saint-Denis, les personnels de l’Éducation nationale (médecins, infirmières, assistantes sociales) qui jouent un rôle important d’information et de prévention auprès des parents, et de mettre l’accent sur l’importance de la prévention des cancers.
Améliorer la couverture vaccinale HPV des jeunes pantinois âgés de 11 à 19 ans
Première étape : identifier les leviers et les freins locaux à la vaccination HPV
Comment ? Avec la création et la diffusion d’un questionnaire anonyme auprès des publics cibles.
Pourquoi ? Afin d’aborder ces thématiques dans leur globalité. Les jeunes, les parents et les professionnels de proximité (santé, animation et éducation) seront sollicités par un questionnaire.
Identifier des publics cibles :
- Les jeunes de 15 à 19 ans (filles et garçons).
- Les parents.
- Les professionnels de santé (médecins généralistes, pédiatres, équipes santé de l’Éducation nationale, pharmacies, CMSU...)
- Les professionnels de l’éducation et de l’animation (enseignants, animateurs, psychologues de l’éducation...).
Les objectifs du questionnaire :
- Identifier les freins et leviers à la vaccination HPV chez les jeunes de 11 à 14 ans, mais aussi dans le cadre du rattrapage vaccinal de 15 à 19 ans.
- Mobiliser et accompagner les acteurs locaux afin de développer une dynamique de travail en réseau autour de la promotion et de la vaccination HPV.
- Expérimenter et évaluer une action pilote de promotion et de vaccination HPV dans la ville de Pantin en privilégiant les quartiers prioritaires.
Résultats de l'enquête
Auprès dès jeunes
46 % des jeunes de 15 à 19 ans interrogés ont déjà entendu parler des HPV
42% des jeunes interrogés savent qu'il existe une vaccination contre les HPV
Pour les jeunes déjà vaccinés ou bientôt, les principales motivations sont :
- le risque de développer un cancer lié aux HPV : 72 %
- avoir été informé par le.la médecin de famille : 33%
- le fait d'être favorable à la vaccination : 44 %
Pour les jeunes non vaccinés, les principaux freins sont :
- le fait de ne pas être au courant, pas informé : 67%
- le fait de ne pas se sentir concerné : 31%
- la peur des effets secondaires : 20%
L'importance d'informer les jeunes de Pantin
80 % de la population sera exposée à un virus HPV. Pourtant, environ un tiers des jeunes interrogés ne se sent pas concerné.
Il est important de les informer des risques et des moyens de prévention afin de leur donner les moyens d'agir pour leur santé. En effet, 58% des jeunes de Pantin ne savent pas que la vaccination existe, ni qui peut être vacciné, ni quand.
Auprès des parents
93% des parents interrogés ont déjà entendu parler de la vaccination contre les HPV
52% des parents interrogés estiment ne pas avoir assez d'information sur le vaccin, les recommandations ou son efficacité
Pour les parents ayant choisi de faire vacciner leur enfant, les principales motivations sont :
- le risque qu'il ou elle développe un cancer un jour : 61%
- le fait d'être favorable à la vaccination : 41%
- les informations sur l'efficacité de la vaccination : 28%
Pour les parents ayant choisi de ne pas faire vacciner leur enfant, les principales raisons sont :
- le manque d'information : 43%
- la peur des effets secondaires : 27%
- le parents pense que son enfant n'est pas concerné : 21%
Les parents interrogés ont pu indiquer, selon elles et eux , les actions pouvant améliorer la vaccination et la prévention contre les HPV :
- séance d'information auprès des jeunes : 67%
- séance d'information auprès des parents : 61%
- campagne d'information à Pantin : 41%
- consultation d'information et de vaccination dans les établissements scolaires : 42%
- réalisation de la vaccination en pharmacie : 22%
L'importance d'informer les parents de Pantin
L'information permet de lever les doutes et les craintes quant à l'efficacité et l'utilité de la vaccination . En effet, 100% des personnes qui s'estiment tout à fait informées ont répondu avoir fait vacciner leur enfant !
En revanche parmi les personnes qui ne s'estiment pas du tout informées, 70% ont choisi de ne pas faire vacciner leur enfant ou bien n'ont pas encore décidé.
Auprès des professionnels de santé
48% des professionnels interrogés s'estiment suffisamment ou tout à fait formés sur les HPV, les différents risques liés et la vaccination.
59% des professionnels abordent peu ou jamais les HPV avec les jeunes qu'ils ou elles rencontrent. Quelles sont les principales raisons ?
- le manque de temps : 31%
- le fait de ne pas y penser : 50%
- le manque d'information sur les HPV et le vaccin : 50%
- le fait de ne pas savoir comment aborder le sujet : 12,5%
53% des professionnels interrogés pratiquent la vaccination HPV. Ces professionnels sont médecins, infirmiers, infirmières, sages-femmes ou pharmaciens, pharmaciennes.
Les entretiens
Les professionnelles ont pu décrire leur pratique et notamment la manière dont elles abordent la santé sexuelle et les HPV auprès de leurs patients
Les deux médecins généralistes rencontrées profitent en général des rappels de vaccins pour parler des HPV. Toutefois ce n'est pas systématique. Quelques fois, les HPV vont être présentés lors des consultations de gynécologie. La sage-femme a indiqué aborder la vaccination avec toutes ses patientes mais l'abordent peu avec celles de plus de 19 ans, non vaccinées, pour qui le vaccin n'est plus pris en charge financièrement.
Dans leur pratique, les professionnelles présentent le vaccin et laissent les parents réfléchir en indiquant des sites d'information et/ou en laissant une prescription.
Deux professionnelles ont indiqué ne pas toujours aborder le sujet de peur d'avoir un effet négatif. De plus, toutes les professionnelles rencontrées ont indiqué que le temps de consultation ne leut permet pas toujours d'aborder ce sujet qui n'est pas "prioritaire" par rapport au sujet de la consultation..
L'infirmière rencontrée travaille en CMS sur les maladies cardiometaboliques et donc ne parle pas des HPV car ce n'est pas son domaine d'intervention. Elle a ajouté que contrairement aux autres vaccins ou cancers, il n'y a aucun affichage sur le sujet ou brochures dans la structure.
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Leurs constats
Le principal frein selon les professionnelles de santé rencontrées sont la perception des parents du vaccin en lien avec un manque d'informations. Leur constat est que ce vaccin est très souvent mal accueilli par les parents.
Plusieurs raisons sont évoquées :
- le fait qu'il ne soit pas obligatoire fait douter de son efficacité ;
- le fait de devoir faire des frottis malgré le vaccin ;
- le lien avec la sexualité ;
A cela s'ajoute la méfiance générale envers les vaccins. Toutefois plusieurs professionnelles indiquent que les personnes de plus nombreuses à perte au courant de l'existence du vaccin. Elles perçoivent qu'il est plus accepté pour les filles lorsque les professionnel·le·s mettent en avant les recommandations. Moins chez les garçons.
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Leurs perspectives
Les professionnelles ont cité plusieurs leviers pour améliorer la couverture vaccinale contre les HPV. La majorité souhaite une meilleure communication et une meilleure information des publics notamment des parents :
- par de la documentation et des affiches que les professionnel·le·s pourraient utiliser
- par des réunions au sein des collèges
- par une prévention renforcée des cancers notamment lors des dépistages des parents
Ensuite, les médecins généralistes évoquent la nécessité d'aborder automatiquement les HPV et la vaccination avec les patients. Les professionnelles ont cité la CPTS de Pantin comme moyen pour travailler en réseau de professionnel·le·s. D'une part, pour permettre aux professionnel·le·s de santé de mieux connaitre les offres de soins sur le territoire.
Puis, pour que les professionnel·le·s du social et de l'éducation puissent facilement orienter les jeunes.
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Les contraintes
Pour la mise en place d'une campagne d'information (brochures et affiches) plusieurs professionnelles rappellent l'importance d'une campagne accessible : facile à comprendre et une diffusion large dans les espaces publics fréquentés.
Si des réunions ont lieu, une professionnelle conseille d'éviter un aspect trop médical dans l'approche et le lieu d'intervention (centre de santé). Le tabou autour de la sexualité est également cité comme un frein.
Sur une éventuelle implication dans ces actions, le frein principal est le manque de temps des professionnels de santé.
Résultats de l'enquête auprès des professionnels du social et de l'éducation
85,7% des professionnels interrogés ont déjà entendu parler des HPV et de la vaccination.
Les professionnels qui abordent les questions de santé sexuelle et les HPV ont été interrogés sur les difficultés rencontrées :
- Le fait de ne pas être identifié comme personne ressource sur ces sujets / la crédibilité
- Le manque de formation ou d'informations à jour
- Le manque de temps
- Le fait de ne pas connaitre un réseau de professionnels ou ne pas savoir orienter
- Le tabou autour de ces sujets
- Le manque de documentations, supports sur lesquels s'appuyer
Les actions qui permettraient de faciliter la vaccination des jeunes, selon les répondants :
- séance d'information auprès des jeunes : 83%
- séance d'information auprès des parents : 61%
- campagne d'information à Pantin : 54%
- consultation d'information et de vaccination dans les établissements scolaires : 56%
Les entretiens avec les professionnels du social et de l'éducation
Leurs actions
Des ateliers ou des animations sont menés dans les structures des professionnelles rencontrées. Dans les trois cas, les professionnelles n'interviennent pas elles-mêmes.
Au sein de la mission locale, les professionnelles font appel à leurs partenaires pour la thématique Vie affective et sexuelle notamment le CRIPS. Pour les bilans de santé et le suivi des bénéficiaires, la structure a également développé des liens avec la CPAM et un centre municipal de santé. Un atelier de sensibilisation a été organisé puis des rendez-vous à la CPAM ont été proposés.
Enfin, avec chaque jeune, les professionnel·le·s de la mission locale abordent les sujets de santé lors de son arrivée dans la structure. Si le ou la jeune n'aborde pas le sujet, il ou elle n'y est pas forcé. Quelques brochures et affiches sont également mises à disposition des jeunes.
Leurs constats
Les deux professionnelles de l'insertion professionnelle ont fait des constats similaires. Le sujet de la santé sexuelle n'est pas facilement abordé par les jeunes accompagnés. En effet, les jeunes ne perçoivent pas toujours les professionnelles comme des ressources.
Lorsque la santé sexuelle est abordée, les HPV ne sont jamais mentionnés, ni la vaccination.
C'est également le cas pour la formatrice rencontrée. Elle aborde la santé sexuelle avec les futurs auxilliaires en puériculture lors de leurs cours. Là aussi, les HPV sont peu mentionnés.
Les deux conseillères en insertion professionnelle rencontrées ont exprimé de plus grandes difficultés à aborder ce sujet avec de jeunes hommes par rapports aux jeunes femmes qu'elles accompagnent.
Les perspectives
Les trois professionnelles ont fait part de leur souhait de multiplier les actions autour de la santé sexuelle et notamment les HPV. En effet les professionnelles de l'insertion souhaitent développer au sein de leur structure des partenariats et des activités pour faciliter l'accès à la santé des jeunes accompagnés:
La proposition d'un travail en réseau avec divers professionnels du territoire autour de la prévention des HPV a été accueillie avec intérêt.
La formatrice rencontrée est intéressée par cette dynamique. En tant que puéricultrice elle est déjà membre du réseau régional de Périnatalité. Pour les deux conseillères en insertion cela ferait également sens. D'une part car elles sont parfois limitées par le temps pour permettre une accompagnement en santé complet, en plus de leurs missions principales. D'autres part, cela leur permettrait d'orienter les jeunes en confiance vers des professionnels d'un réseau.
Selon elles, les actions d'information des jeunes et d'information des parents, par des séances d'animation ou par des brochures et campagnes, doivent être menées de manière concomitante. Une des professionnelles cite également la formation pour les pros sur les HPV.
Synthèse et suite du projet
L'état des lieux réalisé a permis de mettre en évidence les freins et contraintes pouvant exister ainsi que les différentes pistes d'actions pour améliorer la couverture vaccinale HPV chez les jeunes de Pantin.
Une meilleure information des publics ressort comme la priorité :
- En effet, parmi les jeunes de Pantin interrogés, 52% des jeunes de 15 à 19 ans n'ont jamais entendu parler des HPV.
- 54% des parents ayant répondu estiment ne pas avoir assez d'information sur les HPV et la vaccination.
- Même constat pour les professionnels de santé qui considèrent le manque d'information comme le principal frein à la vaccination (54%). Elles et eux-mêmes n'abordent pas toujours ce sujet par manque d'information ou par oubli.
- Enfin, 74% des professionnels du social et de l'éducation abordent les questions de santé sexuelle. Pourtant, par manque d'informations suffisantes, 54% n'abordent jamais les HPV.
En outre, les leviers à la vaccination mis en avant par les publics sont les séances d'information auprès des jeunes et les campagnes de vaccination.
Pour cela, la mobilisation et l'implication des différents professionnels de santé (les médecins, les pharmaciens et pharmaciennes, les infirmiers et infirmières scolaires...)est nécessaire. Ils et elles sont la première source d'information des publics sur ces sujets. De même, les professionnels du social et de l'éducation ont un rôle à jouer en tant qu'acteurs et actrices de proximité, présents au quotidien auprès des jeunes et des parents. Les partenariats entre acteurs locaux et professionnels permet de créer un réseau efficace sur le territoire.
Toutefois, les professionnels évoquent différentes contraintes. En effet, une grande partie mentionne un manque de temps pour traiter davantage le sujet en consultation ou mener des actions autour de la santé sexuelle. De plus, les professionnels du social indiquent de réelles difficultés de mobilisation des jeunes lors de séances ou actions de promotion de la santé.
Les dernières mesures de prévention contre les HPV sont également à prendre en compte pour les prochaines étapes du projet : la généralisation de la vaccination HPV dans les collèges à partir de la rentrée 2024.
L'enjeu des prochaines étapes du projet sera de s'inscrire dans la dynamique mise en place par les politiques de santé publique. Informer et outiller les professionnels de Pantin sur les HPV et renforcer les réseaux et échanges entre professionnels permettra une meilleure information des publics.
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Recherche et actions sur la vaccination HPV à Pantin
Découvrez la recherche et les actions sur la vaccination HPV à Pantin, réalisé entre Octobre 2022 et Mars 2023.
Etat des lieux des freins et des leviers à la vaccination contre les HPV.
Un projet en partenariat avec l'ARS (Agence Régionale de Santé).Date de publication 2023Auteur: Crips Île-de-France -
Prévention des HPV : sensibiliser les jeunes et leurs parents
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Les points clefs pour informer sur la vaccination contre les papillomavirus.
Document à destination des professionnels de santé, de l'éducation, de la jeunesse et du social de la ville de Pantin.Date de publication 2024Auteur: Crips Île-de-France